Face aux bouleversements climatiques actuels, il devient urgent de repenser nos modes de construction et d’aménagement afin de minimiser notre empreinte carbone. Parmi les solutions innovantes mêlant esthétisme et performance énergétique, les façades végétalisées ou murs végétaux s’imposent comme de véritables piliers de l’architecture durable.
En effet, ces murs recouverts de verdure offrent non seulement un spectacle visuel agréable, mais participent activement à la lutte contre le changement climatique en absorbant le dioxyde de carbone et rejetant de l’oxygène via le processus de photosynthèse.
Saviez-vous qu’une façade végétale de 100 m² peut absorber jusqu’à 5 kg de CO₂ par an ? (Source : étude de l’Université technique de Munich)
De plus, ces dispositifs permettent d’améliorer significativement l’isolation thermique des bâtiments, aussi bien en été qu’en hiver. Grâce à l’évapotranspiration des plantes et à leur capacité d’absorption des rayonnements solaires, les températures intérieures peuvent être régulées, entraînant une diminution de la consommation énergétique due au refroidissement artificiel.
Selon certaines estimations, une façade végétale peut réduire la demande en climatisation jusqu’à 30% (Source : City of Toronto).
Nous explorerons ici en détail les nombreux avantages offerts par les façades végétalisées, telles que l’augmentation de la biodiversité en ville, l’atténuation des îlots de chaleur urbains et l’optimisation de la gestion des eaux pluviales.
Nous aborderons également les différentes techniques d’implémentation et présenterons plusieurs exemples concrets de réalisations réussies.
Avantages environnementaux des façades végétalisées
Les façades végétalisées tout comme les toitures végétalisées offrent de nombreux atouts en matière de protection de l’environnement. Elles améliorent la qualité de l’air, favorisent le confort thermique des bâtiments, atténuent les îlots de chaleur urbains, augmentent la biodiversité en zone urbaine et contribuent à une meilleure gestion des eaux pluviales.
Amélioration de la qualité de l’air
Grâce à la captation de CO2 et de particules polluantes, les façades végétalisées jouent un rôle crucial dans l’assainissement de l’air ambiant.
Par exemple, une étude menée par l’université de technologie de Berlin (Berlin Institute of Technology) a montré qu’une surface végétalisée de 100 m² pouvait filtrer jusqu’à 2,1 kg de particules fines PM₁₀ chaque année, participant ainsi à la purification de l’air et à la réduction des risques sanitaires associés à la pollution atmosphérique.
Amélioration du confort thermique des bâtiments et réduction des frais de chauffage et de climatisation
La présence de plantes sur les façades extérieures permet de créer un microclimat autour du bâtiment, ce qui influe positivement sur son isolation thermique.
L’Institut national de recherche sur les transports (INRETS), dans une publication datant de 2013, indiquait que les façades végétalisées avaient le potentiel de diminuer la température intérieure des locaux jusqu’à 6°C pendant les mois d’été, conduisant ainsi à une réduction importante des coûts liés à la climatisation.
De même, en période hivernale, les pertes de chaleur peuvent être limitées, engendrant une moindre consommation énergétique pour le chauffage.
Atténuation des îlots de chaleur urbains grâce à l’ombrage et à l’évapotranspiration
L’ombre fournie par les plantes sur les façades végétalisées contribue à limiter l’exposition directe des bâtiments au soleil, tandis que l’évapotranspiration – le phénomène consistant en l’évaporation de l’eau par les feuilles – engendre une sensation de rafraîchissement similaire à celle provoquée par la brume marine.
Ces deux facteurs conjugués permettent de lutter efficacement contre les îlots de chaleur urbains, contribuant ainsi à une diminution des pointes de température durant les périodes estivales particulièrement chaudes.
Augmentation de la biodiversité en milieu urbain
Intégrer des façades végétalisées dans les zones urbaines revient à créer un habitat supplémentaire pour la faune locale, notamment pour les insectes, oiseaux et petits mammifères.
Cette augmentation de la biodiversité en ville soutient indirectement d’autres fonctions écologiques positives, tel que la pollinisation des cultures locales ou encore la régulation des populations nuisibles aux humains, comme les moustiques.
Préservation des ressources naturelles grâce à la gestion alternative des eaux pluviales
Les façades végétalisées facilitent l’absorption des précipitations par les plantes, ce qui retarde et réduit le ruissellement vers les réseaux d’assainissement.
Cela permet de soulager la pression exercée sur ces derniers et de diminuer le volume total d’eau usée à traiter.
Lorsque combinées à d’autres mesures de gestion alternative des eaux pluviales, comme les toitures végétalisées ou les jardins pluviaux, les façades végétalisées peuvent appuyer les efforts visant à préserver les ressources hydriques, à accroître la résilience face aux événements extrêmes et à limiter les impacts négatifs liés à l’imperméabilisation excessive des sols en ville.
De ce fait, elles font partie intégrantes des outils de l’architecture bioclimatique visant à rendre les bâtiments résilient au changement climatique.
Choix des plantes & matériaux
Le succès d’une façade végétalisée dépend grandement de la sélection judicieuse des plantes et des matériaux adaptés aux conditions environnementales spécifiques.
Il convient de prendre en compte certains paramètres essentiels lors du choix des espèces végétales et des composants structuraux pour garantir la viabilité et la durabilité de l’ensemble.
Facteurs influençant le choix des espèces végétales (ensoleillement, vent, etc.)
- Ensoleillement : Opter pour des plantes capables de tolérer différents niveaux d’ensoleillement en fonction de l’orientation de la façade et de la latitude du lieu
- Vent : Choisir des variétés résistantes aux conditions venteuses, en tenant compte de la direction dominante du vent dans la région
- Humidité relative : Sélectionner des espèces adaptées aux fluctuations quotidiennes et saisonnières du taux d’humidité relative
- Température : Prendre en considération les amplitudes thermiques diurnes et nocturnes susceptibles d’affecter la survie et la croissance des plantes
- Type de substrat : Adapter les plantes au support disponible, qu’il soit organique, minéral ou synthétique
Exemples de plantes couramment utilisées et leur entretien associé
- Hedera helix (Lierre commun) : Requiert peu d’entretien, s’adapte à divers types de sols et supporte l’ombre ; taille occasionnelle nécessaire pour contrôler sa propagation
- Sedum album (Orpin blanc) : Idéal pour les expositions ensoleillées, exige peu d’eau et supporte les basses températures ; désherbage régulier conseillé pour empêcher la croissance d’espèces invasives
- Parthenocissus tricuspidata ‘Veitchii’ (Vigne vierge de Boston) : Croît vigoureusement en plein soleil ou mi-ombre, nécessite un arrosage modéré et doit être taillée tous les ans pour maîtriser sa progression
Matériaux appropriés pour supporter la structure et garantir la longévité
- Treillis métalliques : Faciles à installer et légers, ils constituent un excellent support pour les plantes grimpantes ; opter pour des alliages corrosion-résistants comme l’acier galvanisé ou l’aluminium
- Systèmes de culture hors-sol : Modules préfabriqués, sacs de culture et structures textiles permettant de cultiver des plantes sur des murs verticaux ; veiller à utiliser des matériaux robustes et durables, tels que le polyester recyclé ou le PVC rigide
- Supports muraux : Fixations spécialement conçues pour les façades végétalisées, garantissent une installation rapide et fiable ; privilégier les produits dotés d’une certification environnementale, telle que ISO 14001 ou LEED.
Techniques d’Installation
L’installation de façades végétalisées implique une série d’étapes et de choix techniques devant être effectués en fonction des objectifs visés, de la configuration spatiale et des ressources financières disponibles.
Pour maximiser les avantages environnementaux et esthétiques tout en minimisant les coûts et les besoins en entretien, il est primordial de sélectionner la bonne technique d’installation.
Différences entre les façades végétalisées extensives, intensives et semi-intensives
- Extensive : Façades légères comprenant une fine couche de substrat (entre 5 et 15 cm) et des plantes tapissantes à développement lent, généralement adaptées aux murs inclinés ; budget accessible et faible entretien requis
- Semi-intensive : Façades moyennement lourdes possédant une épaisseur de substrat intermédiaire (15 à 30 cm) autorisant une grande variété de plantes vivaces, rampantes ou herbacées ; investissement initial plus important et suivi régulier nécessaire
- Intensive : Façades lourdes dotées d’une profondeur de substrat substantielle (>30 cm), où presque toutes les espèces végétales peuvent être cultivées ; infrastructure complexe et charges additionnelles imposant des restrictions quant à l’utilisation de cette technique
Méthodes de fixation des plantes : treillis, modules préfabriqués ou systèmes hydroponiques
- Treillis métalliques : Structure simple et économique servant à guider la croissance des plantes grimpantes le long des murs ; compatibilité variable avec les systèmes de gouttière et de descente pluviale déjà en place
- Modules préfabriqués : Panneaux standardisés contenant des cellules individuelles destinées à recevoir les plantes, idéalement adaptés aux façades planes ; simplifient la phase d’installation mais restreignent les options de personnalisation
- Systèmes hydroponiques : Culture de plantes hors-sol alimentées par une circulation continue d’eau nutritive, convenant aux configurations verticales et horizontales ; procurent un rendement optimal et une flexibilité accrue au niveau du design, mais exigent un équipement sophistiqué et une expertise technique
Intégration harmonieuse des façades végétalisées dans les designs existants
Pour assurer une intégration esthétique et fonctionnelle des façades végétalisées dans les designs existants, il est possible d’avoir recours à différentes tactiques, notamment :
- Identifier les opportunités de superposer les nouvelles installations aux éléments architecturaux préexistants, tels que les balcons ou les encorbellements
- Collaborer avec des concepteurs paysagistes et des experts en ingénierie biotechnique afin de développer des concepts novateurs et adaptés aux particularités du projet
- Considérer la palette chromatique automnale des végétaux lors de la conception de l’assemblage final, anticipant ainsi l’évolution cyclique des teintes et des textures
Exemples concrets & études de cas dans le monde
Des initiatives audacieuses de façades végétalisées voient le jour partout dans le monde, transformant les villes traditionnellement minérales en havres de verdure luxuriante.
Nous examinerons ici quatre projets exceptionnels, illustrant respectivement les accomplissements et difficultés inhérents à la mise en œuvre de ces technologies vertes.
1 – Bosco Verticale (Milan, Italie)
Considéré comme l’emblème des villes intelligentes et durables, le Bosco Verticale de Milan abrite près de 900 arbres et 2000 autres plantes sur ses deux tours résidentielles de 110 et 76 mètres de hauteur.
Depuis son inauguration en 2014, il affiche un taux de satisfaction record chez ses occupants (+90%) et a stimulé le marché immobilier local, doublant les valeurs foncières aux alentours.
Toutefois, les coûts initiaux ont été estimés à 78 millions d’euros, représentant un investissement colossal difficilement comparable aux projets conventionnels.
2 – One Central Park (Sydney, Australie)
Combinant architecture contemporaine et innovation botanique, One Central Park symbolise le dynamisme australien en matière de développement durable. Sa tour sud culmine à 116 mètres et arbore 38 000 plantes réparties sur trois niveaux distincts : sol, mur et terrasse suspendue.
Malgré une maintenance exigeante requérant six jardiniers permanents, elle obtient un score WELL Building Standard™ Gold, reconnaissance internationale saluant la qualité de vie intérieure.
Son bilan énergétique reste malgré tout perfectible, puisque sa consommation annuelle représente 44 kWh/m².an, loin derrière les standards européens.
3 – Atrium Shed (Singapoure)
Construit en 2017, l’Atrium Shed illustre une nouvelle tendance singapourienne axée sur la densification vertueuse. Situé dans le quartier animé de Kampong Bugis, ce bâtiment hybride mixte de sept étages incorpore une serre tropicale sur son toit et une double peau végétalisée sur sa façade nord-est.
Si le projet suscite admiration et curiosité, son ratio constructible demeure inférieur à celui des édifices traditionnels, freinant son adoption massive.
4 – ACROS Fukuoka Prefectural International Hall (Fukuoka, Japon)
Érigé en 1995, l’ACROS Fukuoka Prefectural International Hall figure parmi les pionniers mondiaux des bâtiments verts. Installé sur un terrain escarpé, il dispose de six niveaux accessibles au public et d’une immense façade végétalisée comptant 35 000 arbustes et plantes.
Au cours des années, le projet a fait l’objet de critiques relatives à l’entretien fastidieux et coûteux, néanmoins, il a eu un impact majeur sur la sensibilisation environnementale et le développement de politiques publiques favorisant les constructions durables.
Exemples de façades végétalisées en France
1. Le Musée du Quai Branly – Jacques Chirac, Paris
Conçu par l’architecte Jean Nouvel, le musée du Quai Branly se distingue par sa muraille végétale de 200 m², créée par le botaniste Patrick Blanc. Cette façade vivante est composée de plus de 15 000 plantes de 150 espèces différentes, créant un tableau vivant qui change au fil des saisons. Elle illustre parfaitement comment l’art, l’architecture et la nature peuvent se rencontrer en milieu urbain.
Localisation : 7e arrondissement de Paris, au pied de la Tour Eiffel.
2. Tower Flower, Paris
La Tower Flower se distingue par sa façade ornée de pots de fleurs en béton qui semblent flotter autour de la structure. Ces pots accueillent une variété de plantes vivaces et arbustes, contribuant à la biodiversité locale et offrant un isolant naturel pour le bâtiment.
Outre son aspect esthétique, cette végétalisation joue un rôle dans l’amélioration de la qualité de l’air, l’isolation thermique et acoustique, et le bien-être des résidents.
L’utilisation de pots de grande taille permet une plantation d’arbres plutôt que de simples petites plantes, offrant ainsi une densité de verdure plus importante que celle trouvée dans les projets de façades végétalisées typiques.
Localisation : 23 rue Albert-Roussel, Paris 17e.
3. L’Oasis d’Aboukir, Paris
Cette installation verticale, également réalisée par Patrick Blanc, transforme un coin de rue ordinaire en un spectacle de biodiversité. Elle abrite plus de 7 600 plantes de 237 espèces différentes.
L’Oasis d’Aboukir améliore l’isolation du bâtiment, contribue à la purification de l’air et au rafraîchissement de l’environnement urbain.
Ce mur végétal est devenu un point de repère pour les habitants et les visiteurs, illustrant comment l’intégration de la nature en ville peut transformer l’espace public.
Localisation : 83 rue d’Aboukir, Paris 2e.
Entretien & maintenance des murs végétaux
Une fois installées, les façades végétalisées nécessitent un entretien et une maintenance minutieux pour garantir leur pérennité et prévenir les dysfonctionnements. Plusieurs facteurs affectent le rythme et le type d’interventions requises, dont le type de façade, la composition végétale et l’environnement local.
Conseils pratiques pour assurer la pérennité des installations végétalisées
- Planifier des visites d’inspection fréquentes (minimum mensuelles) pour identifier toute anomalie ou dommage
- Effectuer une fertilisation régulière, en accord avec les cycles de croissance des plantes, en ayant recours à des engrais organiques ou chimiques adaptés
- Surveiller attentivement l’hydratation des végétaux, en ajoutant des systèmes d’irrigation autonomes si nécessaire
- Nettoyer les systèmes de drainage et d’évacuation des eaux pluviales pour éviter les obstructions et les fuites
- Assurer un contrôle strict des adventices et parasites, en adoptant des méthodes manuelles, physiques ou chimiques conformes aux normes environnementales en vigueur
- Renouveler régulièrement une fraction des plantes (~10%) pour garantir une densité et une diversité végétale satisfaisantes
Conclusion
Après avoir passé en revue les différents aspects relatifs aux façades végétalisées, force est de constater qu’il s’agit d’une solution écologique porteuse d’avenir dans l’architecture moderne.
Non seulement ces murs végétaux embellissent les bâtiments et les quartiers, mais ils offrent également une multitude d’avantages environnementaux, sociaux et économiques.
Ils améliorent la qualité de l’air, contribuent à la régulation thermique, encouragent la biodiversité, favorisent la gestion alternative des eaux pluviales et augmentent le sentiment de bien-être des habitants.
Il existe plusieurs catégories de façades végétalisées, classées en fonction de leurs caractéristiques techniques et botaniques. Chaque type de façade impose des exigences particulières en matière de choix des plantes, de matériaux et de techniques d’installation. Un entretien régulier et adapté assure par ailleurs la durabilité de ces installations.
Malgré les coûts initiaux souvent élevés, les avantages à long terme des façades végétalisées compensent largement ces investissements. À travers le monde, de nombreux projets remarquables témoignent du potentiel de ces technologies vertes et inspirent d’autres promoteurs et architectes à franchir le pas.
Sources et références
La végétalisation des façades, nouvel enjeu des projets d’urbanisme – Construction21
Ce site présente un panorama des avantages de la végétalisation des façades dans les projets d’urbanisme, notamment à Paris. Il souligne les bienfaits écologiques, tels que la gestion des eaux pluviales, le développement de la biodiversité, l’amélioration de l’isolation thermique et phonique, ainsi que la contribution à la lutte contre les îlots de chaleur urbains. La végétalisation des murs offre également des bénéfices esthétiques et contribue à l’amélioration de la qualité de l’air. Lien
Feu vert aux dérogations au PLU pour la végétalisation des façades ou des toitures – Ordre des architectes
Cet article discute de nouvelles mesures adoptées en France qui permettent des dérogations au Plan Local d’Urbanisme (PLU) afin de favoriser la végétalisation des façades et des toitures. Cette initiative vise à encourager les projets d’architecture durable en facilitant l’intégration de la nature en ville. Lien